La vallée de la
Haute Moselle n’a pas fini de révéler son passé minier. L’équipe
de la SESAM s’emploie à le faire resurgir et le faire connaître.
Si les Hautes
Mynes ont acquis une enviable notoriété – qui ne cesse d’ailleurs
de grandir – elles doivent cet énorme succès au travail effectué
depuis 30 ans par les membres de la SESAM (Société d’Étude et de
Sauvegarde des Anciennes Mines). Arpentant le terrain de long en
large en tous sens dans toute la vallée de la Haute Moselle, armé
d’une culture scientifique « béton », les troupes de
Francis Pierre ont su remettre ces vestiges à l’ordre du jour et
permettre leur exploitation, non pas minière, mais touristique cette
fois.
Forte de cette réussite spectaculaire, la SESAM aurait
fort bien pu s’en satisfaire et se reposer sur ses lauriers. Ce
n’est pas du tout le cas ! Le filon est loin d’être devenu
sans intérêt et les ramifications sont nombreuses. En parcourant
les archives, de nombreux indices non encore corrélés avec des
découvertes sur le terrain restent en suspens.
Récemment, la
commune de Fresse a débuté des travaux de modification d’un
carrefour chemin de Noiregoutte du côté de la Colline. Un endroit
où justement des indices d’activité minière ont été repérés
par Francis Pierre et son équipe. « La mairie, qui joue
parfaitement le jeu et avec laquelle nous aimons particulièrement
travailler pour la belle conscience qu’elle a de son patrimoine,
nous a alerté de ces travaux » explique Francis Pierre « Nous
savions que sur place, des vestiges pouvaient être découverts. Nous
avons donc déposé une demande de sondage d’urgence qui nous a été
accordée ».
Le chercheur poursuit en détaillant les
raisons de ces fouilles : « Une carte de Cassini évoque
un point « stolle » à cet endroit. Un gros indice pour
mener des recherches sur le terrain ! » avant de
poursuivre « Un filon argentifère de 4.5 km partant de la
chapelle des Vés et allant quasiment jusqu’à Bussang et passant
par Noiregoutte était exploité au XVIème siècle, jusqu’en 1580,
année de la visite de Montaigne, puis un peu au début du XVIIIème,
par des privés sous autorisation ducale.
Une roue de dix mètres de diamètre Une période pour laquelle les archives sont nettement moins riches que sous exploitation directe des Ducs de Lorraine » regrette Francis Pierre. Vingt-trois mines étaient ainsi parsemées le long de ce filon vertical coincé entre deux parois granitiques ». Une configuration compliquée qui a nécessité une exploitation en colonnes verticales, quelques fois bien profondes. Des puits qui n’ont pas manqué de se remplir d’eau qu’il a bien fallu évacuer afin de poursuivre l’exploitation. « Nous avions donc une grosse suspicion de présence d’un système de pompage » reprend Francis Pierre. Les hypothèses se sont transformées en certitudes avec la découverte de massifs de pierres servant de supports au système de tirants relié à une roue à augets. « Cette roue devait faire dix mètres de diamètre afin de disposer de la force nécessaire non seulement pour extraire l’eau, mais également pour entrainer le système de transmission du mouvement en bois qui, au total devait approcher les deux tonnes ». Pour que l’eau fournie par le ruisseau de la Colline, pour lequel Francis Pierre relève qu’il n’est jamais à sec, parvienne à entrainer cette mécanique, il a fallu l’installer à quelques sept cents mètres en amont du carrefour en cours de travaux. « Plus tard, le système de pompage a été modifié de façon à passer par un travers-banc que nous avons retrouvé et qui porte les traces de son implantation » reprend le scientifique archéologue « L’objectif de ce sondage d’urgence n’est pas de tout conserver, mais de pouvoir témoigner de l’existence de cette activité minière avant que les traces ne disparaissent suite aux travaux entrepris par la commune ». Certaines persisteront cependant, qui pourraient être intégrées dans des parcours de découvertes permettant de se rendre compte de l’intense activité qui a régné dans la vallée. C’est du moins le souhait émis par Francis Pierre en guise de conclusion.